© Muzeum Pałacu Króla Jana III w Wilanowie
   |   05.02.2007

Astrologue

ASTROLOGUE OBSERVANT L'ÉQUINOXE D'AUTOMNE
ET SCÈNE D'ADIEUX D'ADONIS À VÉNUS

Dominicus van Wijnen dit Ascanius (1660 - fin des années 90 du XVIIe siècle)
Rome, fin du XVIIe siècle
Signature : ASCANIUS (sur une feuille de papier, en bas à droite à côté du crâne)
Peinture à l'huile, toile, 41 x 49 cm
N° d'inventaire : Wil. 1046

La scène noyée dans l'ombre, éclairée seulement par la lueur des chandelles, les rayons du soleil couchant et de la lune qui se lève, est profondément mystérieuse et difficile à interpréter. Ce genre de tableaux-rébus était particulièrement en vogue à l'époque baroque, surtout chez les peintres romains. L'artiste hollandais Dominicus van Wijnen qui a pris le nom d'Ascanius après s'être établi à Rome et avoir adhéré à la corporation des peintres hollandais de la ville, a souvent représenté des sujets complexes que seul un spectateur érudit peut tenter de comprendre. Sur le tableau de Wilanów, qui est une allégorie des métamorphoses de la nature, il a fait le portrait d'un jeune savant coiffé d'un turban oriental (un astronome, un astrologue ou un mage peut-être) plongé dans ses pensées devant un livre, en train d'observer un phénomène d'astronomie. Le savant voit apparaître les fantômes de deux amants de la mythologie: Vénus et Adonis. Sur l'ordre de Jupiter, après la mort tragique d'Adonis, les deux amants ne pouvaient se voir que la moitié de l'année, au printemps et en été. Le reste du temps, Adonis devait séjourner aux Enfers où régnait Perséphone. Le couple embrassé symbolise l'équinoxe d'automne, moment où les deux amoureux se séparaient, à la venue de l'automne et de l'hiver, quand la nature se mourait. En revanche, au retour d'Adonis, tout renaissait, la végétation reprenait et la nature redevenait féconde. Charon, le nocher des Enfers, vient chercher Adonis. L'artiste lui a donné l'apparence d'un homme nu portant des ailes, émergeant des vagues d'une vaste étendue d'eau. Deux crânes, l'un humain, l'autre animal, rappellent la fin de tout être vivant. La symbolique liée au personnage d'Adonis est évoquée aussi par les décorations sculptées d'un monument antique au sommet duquel est posé un vase, éclairé par derrière par les rayons de la lune. Sur le vase a été représenté probablement le moment de la « naissance » (du retour ?) d'Adonis, au corps d'un jeune enfant que de petits Amours aident à se lever ou à sortir de « l'abîme » (royaume des morts). Plus bas, sur la surface plane d'un sarcophage, l'on voit un homme serré dans les bras de deux autres personnages masculins, l'un vieux, l'autre plus jeune, qui le conduisent peut-être ? La scène a vraisemblablement un lien avec le sens allégorique de toute la composition. Elle représente Thanatos et Hupnos ou deux génies. Les deux images peuvent être une allusion aux cérémonies solennelles de l'antiquité en l'honneur d'Adonis, célébrées dans les pays de la côte est de la Méditerranée et à la frontière de l'Asie occidentale (les Adonies ou « jardins d 'Adonis »). Au cours des nouvelles études menées dernièrement, l'on a noté une version moins populaire du mythe présentée dans les Saturnales de Macrobe, dont a parlé Karel van Mander au début du XVIIe siècle dans ses commentaires sur les Métamorphoses d'Ovide, et qu'Ascanius connaissait certainement. Sur les pages du livre ouvert sur lequel se penche le savant figure le dessin de la position des constellations au moment de l'équinoxe d'automne (la Balance). D'autres constellations complètent le symbole, celle de Hadès ou du Nocher représenté par Charon ainsi que les constellations de Vénus et d'Adonis. Ces constellations étaient visibles sur la partie du firmament observée par les habitants de l'Orient (Sphera Barbarica). L'hypothèse selon laquelle le peintre a représenté, sous les traits du savant, Hipparque de Nice, astronome de l'Antiquité vivant en Asie Mineure, semble fort probable.

Nous ne savons pas en quelle période Stanislas Kostka Potocki a acquis ce tableau exceptionnel, mentionné pour la première fois dans l'Inventaire de 1821 des peintures de Wilanów, et attribué par erreur à Gérard Lairesse.

Krystyna Gutowska-Dudek